Cuzin et Albert Camus, première aux Célestins
Bon, le jeu de mot est facile mais pas faux. Les élèves de terminale TTBEE font un projet inter-établissement avec les élèves de L du lycée Albert Camus, le tout avec le théâtre des Célestins. On a commencé par aller visiter le théâtre avec les TTCB et le groupe de ES. Vous me suivez ?
Récit et explications de Jason et des autres TTBEE épaulés par les TTCB parce qu’il y a beaucoup à dire
Rendez-vous, étape un le bistrot et « les autres »
Madame Rosenfeld avait dit 9H30 devant le théâtre. Timon et moi, on s’était dit 9H00, on avait donc le temps. On vide les poches et les portes-feuilles, on compte la monnaie : 4,50 en pièces de 10 à 50 centimes ! Parfait ! C’est assez pour deux cafés avant d’attaquer. Une fois les petits noirs avalés, on a rejoint ceux qui étaient déjà là, surtout les TTCB, installés sur les bancs, sous les arbres. Entre 9H30 et 9H45, les élèves sont arrivés par petits groupes. Les TTBEE, un peu excités pour certains mais le sourire jusqu’au bonnet et les « inconnus ». C’était étrange, Cuzin d’un côté et les élèves d’Albert Camus de l’autre. On commence par se regarder de loin, on ne s’approche pas trop. Forcément, Madame Rosenfeld a décidé qu’il fallait faire connaissance. Nous sommes allés leur dire bonjour. Il y avait des timides d’autres très conviviaux, les élèves d’un autre établissement ! Pensez donc, c’est peut-être dangereux… Madame Manuard est arrivée, les profs au moins se connaissaient et avaient l’air de s’entendre, elles ne sont pourtant pas dans le même établissement ! 10H50, il y avait du monde sur la place, les médiateurs sont sortis par la porte latérale et là, « on » nous a mélangé (note du traducteur : ordre des profs). L’autre groupe est parti dans le théâtre et moi, je suis resté devant et j’ai écouté l’histoire du théâtre et le commentaire de la façade menés par Aurélien, « notre guide ».
Retour sur le passé
Passionnant mais on aurait pas tout retenu sans le livret que l’on a eu ensuite, n’allez pas exagérer ma mémoire ! Là où se trouve le théâtre des Célestins aujourd’hui, il y a eu pas mal de choses. D’abord l’ordre des Templiers, dissout en 1312. Ensuite, en 1404, l’ordre des Célestins fonde l’abbaye de Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle. A cette époque, l’ensemble est entouré d’une muraille, il y avait une église et on enterrait les moines sur place. Enfin en tout cas deux puisqu’on a retrouvé leurs restes lors de la rénovation en creusant. Ils ont été déplacés et se trouvent dernière le mur sous la scène… on n’a pas demandé s’ils étaient aussi fantômes (il paraît que c’est indispensable le fantôme dans un théâtre). Fin du couvent en 1778 et la société privée qui achète le site décide en 1789 de bâtir un théâtre ce qui est fait en 1792. Sachant l’actualité de l’époque, le nom du théâtre, Le théâtre des variétés, ça laisse un peu perplexe, non ? Le théâtre ouvre, ferme, rouvre en 1838, l’histoire de cette montagne de pierres est pleine de rebondissements qui finissent dans les flammes d’un incendie gigantesque en 1871. Un nouveau théâtre est construit alors par Gaspard André.
Le théâtre à l’italienne de Gaspard André.
Le premier théâtre flambe aussi ! Gaspard André le reconstruit, l’inauguration a lieu en 1881. Voilà ce qui explique que le bâtiment soit bien isolé sur une place, pour éviter la propagation des incendies. Il faut dire qu’à l’intérieur, il y a vraiment beaucoup de bois et beaucoup, beaucoup de tissus très rouges qui prennent le feu. A l’époque des chandelles et des lampes à pétrole, il fallait vraiment être passionné.
Là, j’avais un peu froid aux orteils mais on a commencé à expliquer la façade et on s’est émerveillé. Il y a deux grandes sculptures qui personnifient la comédie avec une marotte de fou et la tragédie avec un flambeau ainsi que les bustes de gens connus : Hugo (pour le drame), de Musset et de Scribe qui était alors très à la mode. Au-dessus sont représentés les masques de comédie et de tragédie qui font référence au théâtre antique. Donc le théâtre s’annonce dans sa façade par ses ornementations. On savait au XIXè siècle, avant d’entrer qu’on peut voir ici des tragédies, des comédies, des drames, des vaudevilles. On peut aussi repérer l’organisation intérieure depuis la façade puisqu’une frise avec une sorte de boutons marque la limite horizontale entre le parterre et la première galerie.
À ce stade, je ne sens plus mes orteils et je me demande s’ils sont encore avec moi. Je ne rêve pas d’incendies et je me mets en marche en suivant le groupe : mes orteils sont toujours là, c’est fou comme on peut s’attendrir sur eux à l’automne ! Nous sommes entrés par la porte latérale. À l’origine, elle servait aux « petits », ceux qui allaient voir le spectacle depuis le paradis, pour ceux qui nous y voient tous, le poulailler pour les autres …
Les espaces intérieurs
Mais nous, on est entré dans l’atrium puisque ces séparations dans les publics c’est terminé. J’ai été impressionné par le lustre et les ocres des murs qui se mélangent aux lumières, l’effet n’est pas mal, presque angélique. D’autres auteurs sont ici représentés, dont Shakespeare. On y trouvait la « boite à sel ». Au XIXè siècle c’est là que le médecin mettait les médicaments et les sels destinés à rendre connaissance aux femmes tombées dans les vapes, victimes de l’émotion, la chaleur et surtout leurs corsets qui les empêchaient de respirer. Comme les filles respirent mieux aujourd’hui (enfin faut espérer), la boite à sel sert de guichet pour la billetterie du soir.
Ascension du théâtre, arrivée au niveau de la corbeille. Là se trouve un espace de bar. On est en fait déjà dans le théâtre, les marbres peints sont faux, comme les tentures de velours. Il y a deux espaces de bar sur deux étages.
Le premier est très richement décoré, avec un portrait de Molière qui regarde les gens, les armes de la ville et les insignes républicains. Il y a des noms d’auteurs célèbres et leurs portraits. C’est le bar d’apparat destiné à la grande bourgeoisie au XIXè siècle. Nous y avons croisé le peintre qui faisait les œuvres du personnage principal de la pièce qui allait se jouer dans les jours suivants, tableau d’une exécution d’Howard Barker.
Il y a un second bar, plus petit. Au-dessus de l’espace de service, certainement en plâtre, une tête de dieu du théâtre (Dionysos) qui ressemble beaucoup à une tête de diable…ambiance. C’est le bon endroit pour apprendre du vocabulaire. On ne dit pas « bonne chance » à un comédien qui va monter sur scène, on dit « merde », pourquoi ? Parce qu’au XIXè siècle, le public vient en calèches, plus il y en a, plus la pièce a du succès et plus il y a de m… Et on ne répond pas « merci », on dit « je prends ». On ne dit pas quoi. Il y a des choses qui ne se font pas : le vert des costumes, peut-être à cause du plomb de la teinture qui pouvait provoquer le saturnisme. Enfin, comme il y a bien des points communs entre le métier de marin et celui de machiniste, mieux vaut ne pas trop parler de cordes.
La salle ….
On est arrivé au paradis. De là, on avait une belle vue sur l’intérieur de l’espace de représentation. Au XIXè siècle, il n’y avait pas de siège au paradis, on devait rester debout tout le spectacle. En tout, il y a environ 700 places dans la salle. On voit bien que les loges de la corbeille et du balcon, les étages les plus chics, étaient surtout faites pour que les spectateurs voient les personnalités importantes qui s’y trouvaient, certaines ne sont pas orientées vers la scène. Il paraît que l’on pouvait y dîner. Les lumières ne s’éteignaient pas pendant la représentation, on venait autant pour voir les gens que le spectacle, et encore certainement parfois pour voir les gens et surtout se montrer, non ? Bon, du paradis, on est très en plongée donc on ne voit parfois pas bien les effets de mise en scène et les décors. On bref, mieux on voit, plus les places sont chères.
Le lustre est impressionnant. Il y a toute une machinerie pour le descendre puisqu’il fallait tous les jours l’alimenter, risques d’incendies maximum ! Aujourd’hui, il est doté d’ampoules (ouf). Du paradis, on voit bien l’espace où se trouvent les cintres, on voit bien comment on montait et descendait les décors, disons qu’à la force des bras, on est content de vivre au XXIè siècle. Tout est rouge, avec des dorures et le rideau de scène est particulièrement soigné. La salle est un spectacle en fait. Sur scène, nous avons vu les préparatifs de montage du décor de la pièce. C’est l’histoire d’une femme à qui Venise commande un tableau sur la guerre et qui fait un tableau sur les horreurs de la guerre. Le commanditaire n’est pas content.
Il ne fallait pas faire de bruit parce que nous sommes arrivés pendant des réglages. On peut se raconter une pièce en regardant travailler les gens, c’est agréable. Ilyès est très fort pour repérer les côtés cour et jardin, cour à droite quand on fait dos à la scène ou gauche quand on fait face et inversement pour jardin, vous suivez toujours ? Et on ne va pas au fond du plateau, on va au lointain, on ne va pas au bord du plateau, on va à la face (des gens).
Et les espaces que l’on ne voit jamais
Ensuite, passage dans les coulisses et visite du foyer des artistes. C’est très joli. On entre dans une pièce assez grande mais pas trop. Il y a un canapé et un écran de télévision qui permet de surveiller la scène, il faut surveiller son entrée et donc éviter de s’endormir devant l’écran. Au fond, un immense miroir pour ajuster son costume et au-dessus une devise aussi belle que sensée : « aimez celui qui vous conseille et non celui qui vous loue ». J’aime bien.
Puis, on est allé sous la scène, il y a un monde fou ! Derrière le mur, les squelettes qui datent du temps de l’abbaye. Devant le mur, des costumes, des accessoires, tout ce qui peut être utile au spectacle. On peut mettre des escaliers pour monter sur le plateau, des machineries.
Avant, il fallait 9 mètres sous la scène pour pouvoir travailler et surtout mettre en place les rideaux de décor. Comme ce n’est plus nécessaire, lors de la rénovation du théâtre, en 2005, il a été possible de construire une petite salle sous le dessous de scène. Là on est tout en bas, sous le niveau du sol. Il y a un bar (il y en a beaucoup des bars dans ce théâtre, non ?) où on peut voir les roues qui permettent de monter et descendre les décors. C’est assez impressionnant quand on sait que tout se faisait à main d’homme.
La Célestine, retrouvailles et premières présentations !
Nous sommes entrés dans la salle, il y avait déjà le premier groupe, retrouvailles. La troupe était un peu fatiguée, on sentait le besoin de s’amuser un peu. Bon, dernière ligne droite, le temps des présentations. Nous avons un peu échangé (un tout petit peu, il faudra insister). Quelques filles semblaient ne pas trop avoir envie de nous parler, mais un garçon, Jaad, est venu courageusement sur scène nous raconter la première séance d’atelier qu’il avait eu avec Marilyn Mattei au lycée Albert Camus.
Et nous, dans la Célestine, on va faire quoi ? Hum, quoi ? Un tabac bien entendu
En quelques mots. Autour de la pièce d’Alexandra Badea, A la trace, nous allons écrire et restituer nos travaux sur scène, dans la Célestine, le 24 avril à 17H30, SAVE THE DATE !!!!
C’est l’histoire de quelqu’un qui trouve un sac et cherche à qui est le sac, un roman policier en quelque sorte. Forcément, un sac, ça en dit long sur son propriétaire mais en même temps, si on n’a pas ses coordonnées, on en sait jamais assez. Nous avons commencé l’écriture avec Marilyne Mattei, moi, je suis en stage donc je loupe un bout, c’est l’autre groupe qui profite de l’occasion. Mais on sera tous là pour la partie de jeu, avec un comédien que l’on ne connaît pas encore mais qu’on sera content de rencontrer. Vous allez en entendre parler toute l’année donc inutile de vous en dire plus… pour l’instant.
Si vous voulez tout savoir sur les Célestins et ce qui s’y est fait, cliquez ici, je n’ai pas tout lu !
Si vous voulez tout savoir sur la vie aujourd’hui des Célestins, ses équipes, comment on y travaille et ce qui se passe durant la saison 2017/2018, c’est ici.
La visite est maintenant terminée, mon opinion est sans appel : que l’on aime ou que l’on n’aime pas le théâtre, cette visite vous met plein de rêves dans la tête !