Théâtre à Cuzin : « La peur des coups » s’est transformée en « moi pas de … ? »

Adem, Séverin, Yvan, Kévin, Larsene

Cette année, nous avons rajeuni Courteline ! Avec Marilyn Mattéi, nous avons réécrit « La peur des coups ». Ensuite nous avons travaillé avec Colin Rey et pour finir, nous avons mené une représentation devant d’autres classes, des professeurs, des membres de la cantine, de l’administration et même le proviseur.

 

On ne travaille pas avec des filles mais des « bonhommes ».

Au lycée, on entend parfois (pas souvent et JAMAIS en ce qui nous concerne) des garçons expliquer bien haut qu’ils vont « casser la figure » à quelqu’un et parfois (très rare) c’est par jalousie. Il est vrai que les filles, il n’y en a pas beaucoup mais on en parle tout le temps, normal, nous avons 15 ou 16 ans. Et parfois aussi, on entend des garçons expliquer qu’ils vont obliger une fille à faire ceci ou cela parce que ce sont des garçons et précisément des « bonhommes ».

Le théâtre certains n’aiment pas

Autant le dire, lire on n’aime pas tous et faire du théâtre pas plus a priori. Nous avons commencé à lire des pièces, chacun la sienne. Certains ont lu des BD mais il fallait dessiner. Ensuite chacun a présenté sa pièce, a écrit une critique. Nous avons fait des dessins et présenté les livres et les critiques au CDI sur une table. Ensuite, nous avons lu une toute petite pièce en cours, La peur des coups.

Il y a des anti-héros

La pièce raconte un retour de bal et une dispute entre Elle et Lui. Lui pense qu’Elle s’est fait pelotée et veut casser la figure au dragueur. Elle le provoque parce qu’elle sait qu’il est lâche et qu’il ne fera rien et Lui se venge sur Elle. Pathétique. Yvan se dit que l’on peut être grossier ou que l’on peut se retrouver dans des situations bizarres où on se ridiculise et on se venge sur plus faible. Et puis on peut être poussé dans ses retranchements. Adem trouve qu’il n’y avait aucune raison que Lui veuille se battre avec l’officier qui avait fait la cour à Elle. Larsene aurait juste divorcé. Yvan non, il aurait tenté de discuter, de ne pas se disputer ou il aurait fait comme Elle, il aurait dragué quelqu’un … et divorcé.  L’histoire raconte des réactions de gens qui ne sont pas heureux. Personne ne trouvait que les relations entre Elle et Lui étaient enviables. Marilyn nous a aidés.

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Photographies Didier Grappe. Marilyn Mattéi est Elle, Colin Rey est Lui dans « la peur des coups » de Courteline

 

Marilyn est venue nous aider.

Pour en parler, on a réécrit la pièce comme si l’action se passait aujourd’hui dans un couple de jeunes qui auraient à peu près une vingtaine d’années. Nous nous sommes répartis le travail et ensuite nous avons tout relu et retouché. On n’aimerait pas du tout être Lui, ni celui de Courteline, ni le nôtre. Mais c’est réaliste. Une réalité que l’on n’a pas envie de connaître ailleurs qu’en la jouant.

Colin nous a dirigé

Nous avons commencé à répéter et nous avons réfléchi à comment présenter la pièce. Il n’y a qu’une fille alors nous avons fait deux groupes : l’un faisait Elle, l’autre faisait Lui. On était six Lui, sept Elle et deux didascalies. Ce n’était pas un problème d’être plusieurs pour un même personnage, on a moins de texte à apprendre. Clara faisait partie du groupe des Elles mais elle aurait pu être un Lui sans problème et les Elles sont des Lui donc on pouvait facilement changer de rôles. De toute manière, le public a compris, on était repérable. On a pu parler en même temps, en choeur pour insister et provoquer des effets. Nous nous sommes arrangés.

Les dernières répétitions

Elles ont eu lieu dans la salle du foyer. Au début, on était cinq mais il faut dire que l’on avait la trouille, que certains n’avaient toujours pas fait signer les conventions de stage, que les ORGO commencent normalement à 9H00, qu’il y avait un problème de bus à Charpennes et un monstrueux bouchon en bas de la montée des soldats. Bon, ensuite on était plus, puis plus puis presque au complet.

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Photographies Didier Grappe. Adem est Elle

On avait révisé. Adem avait répété devant son miroir, Yvan avait déjà relu plusieurs fois toute la pièce, Séverin non. Il la connaissait. Larsene moins. Colin a ramené des viennoiseries.

La répétition a été classe.

Les deux groupes de travail se sont rejoints. C’était rigolo de se mélanger avec les autres, « l’union fait la force » pour Adem. Colin était à fond, il rigolait avec nous et il nous apporte une énergie bizarre. Il n’est pas comme les profs, il est plus relax même s’il est speed. Il rigole quand on dit des plaisanteries. Par contre, quand on dévie il nous cadre. En fait, il pourrait être prof. Marilyn parlait moins, elle restait en retrait et donnait surtout des indications à Colin et parfois directement à nous. On suivait les indications. Elles nous mettaient dans le bain, Colin corrigeait directement nos prestations. Pour Kévin, il y a eu des moments agaçants, Colin a fait répété cent fois la même phrase, mais il y a eu d’autres moments mieux, quand on jouait.

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Photographies Didier Grappe. Jules est Lui

Il y a eu un gouter préparé par la cantine, c’était bien. On a aimé manger et boire, les cakes étaient bons et ceux qui ne pouvaient pas manger durant la journée ont emmené leur part pour le soir. A la fin du goûter alors que les spectateurs commençaient à arriver.

« Merde à vous les enfants »

Colin a fait ses dernières recommandations. Il voulait qu’on soit à l’aise, que l’on ne se focalise pas sur le public, qu’on soit à fond dans le personnage. Il a dit « merde à vous les enfants ». Adem n’a pas compris tout de suite, Larsene si. Kévin aussi.

« C’est quoi tout ce monde ? »

On est entrés dans la salle, on a pris nos places. Il y avait du public. Léonit était au premier rang et il rigolait, au début, c’était déstabilisant, ensuite on l’a oublié. On connaissait aussi Ismael qui s’est réorienté en CAP. Les autres élèves étaient des inconnus. Il y avait aussi des profs : Messieurs Graux, Benoît, Rejneri, Mesdames Lobaccaro, Marcq, Gaunet, des inconnus, des personnes de la cantine et Monsieur Bielmann. Kévin s’est dit « c’est quoi tout ce monde ? » et très vite a oublié le public.

« La peur des coups » d’abord

Madame Rosenfeld a présenté vite le projet et ensuite Marilyn et Colin ont dit la pièce de Courteline. Ils ont mis le ton, on avait l’impression de voir Lui et Elle.  Parfois on avait envie de rire, on comprend vraiment mieux quand des professionnels font la pièce. Ils étaient très à l’aise. En y pensant, on aurait dû leur demander aussi de lire notre pièce pour voir la différence. La nôtre peut-être encore plus drôle lue par eux. Larsene trouve que c’était un peu stressant d’attendre mais Yvan était dans la scène et n’a pas vu passer le temps.

Et puis c’était à nous enfin, « moi pas de … ? »

Yvan au début a eu du mal avec certaines phrases puis tout s’est remis en place et tout allait bien. L’enchainement était bon entre les deux groupes. On s’est fait plaisir. On était content que ça marche. Kévin n’aime pas le théâtre, il aime les maths mais c’était bien. Il était la didascalie, il aime bien. Séverin s’est senti à l’aise dans son rôle.  Larsene a trouvé qu’il y avait plus d’énergie qu’aux répétitions et que c’était fluide.

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Photographies Didier Grappe. Séverin est Lui

Les réactions des spectateurs

Dans la file de la cantine, un professeur que l’on ne connaît pas est venu ensuite nous demander si le théâtre nous a pris du temps pour l’écriture, comment on a fait et si cela nous avait plu. Il ne nous a pas dit ce qu’il a pensé de la pièce. Monsieur Benoit nous a dit que nous l’avions impressionné, il nous a trouvé concentré et il trouve que l’on a du talent. Monsieur Rejneri a dit qu’il était étonné, il a aimé. Il voulait dire étonné que l’on ait réussi à faire ce que l’on avait fait mais dans le sens élogieux.

Photographies Didier Grappe.
Les élèves de 2de AFB et TBORGO

On l’a fait

Grâce à Marilyn et Colin, on a compris le texte d’origine. Avec Marilyn, on a transcrit le texte de départ, elle nous a laissé utiliser notre vocabulaire. Bon, parfois, il y a eu des discussions et des ré-ré-écritures, du coup il y avait débat sur les idées aussi. On les remercie pour leur patience et leur écoute. On a aimé construire un travail de groupe. On était un peu angoissé à l’idée que certains puissent empêcher la pièce de se jouer ou la rendre mauvaise mais en fait, on a très bien géré. Adem a pris le texte d’un absent et ce n’était pas pesant. Yvan et Séverin ont pris des textes d’absents qui sont arrivés à 9H00 et ce n’était pas un problème. Dans la mise en scène, il y avait exactement ce que l’on pouvait retenir concernant les choses à dire ensemble ou les mouvements du coup même si on avait un peu peur avant, on l’a fait.